On est toujours là, toutes les deux, unies non plus par le même félin, mais par la même douleur, la même attente, et la même inquiétude. ~ Avec Audace des Cieux

Mon ventre se faisait de plus en plus lourd. Et avec la maladie qui n’arrangeait rien, on ne pouvait pas dire que j’étais en très grande forme. Déjà qu’avant de tomber enceinte, je restais la plupart du temps allongée dans la Tanière des Anciens, ça n’était pas bien mieux maintenant. À part qu’on m’avait fait changer de tanière, par sécurité pour les petits, et que je me retrouvais maintenant dans la Pouponnière. À part ça, je ressemblais juste de plus en plus à un cachalot échoué. Échoué dans son coin, parce que si c’était mieux pour mes petits que je sois à la Pouponnière, ma présence restait dangereuse pour les deux autres reines, Élégance Florale et Audace des Cieux.

Audace des Cieux. On était rivales étant apprenties, et maintenant, on était presque amies. Parfois la vie était étrange. On se retrouvait d’ailleurs enceintes au même moment. C’en était presque drôle. Là, Coyote de Marbre était sorti, pour accomplir ses devoirs de guerrier, sûrement. Il passait quasiment tout son temps libre avec moi, mais il fallait bien qu’il chasse et patrouille aussi. Dans ces moments-là, je dormais souvent, ou alors je m’ennuyais, comme maintenant. Peut-être était-ce pour cela qu’Audace des Cieux était venue vers moi. Je lui souris, c’était un sourire fatigué, mais j’étais contente qu’elle vienne me voir.

« Salut, tu vas bien ? »

Mine de rien, j’avais hâte d’arriver à terme, parce que j’avais l’impression que les risques grandissaient chaque jour. Que mes chatons étaient plus en danger chaque jour qu’ils passaient dans mon ventre, alors que ça aurait dû être l’inverse. Et surtout, j’avais peur de ne pas arriver à terme, et qu’ils meurent en naissant. J’avais très peur, oui, chaque jour, probablement plus que la plupart des reines. Mais j’étais gravement malade et je ne savais pas comment le mal rouge pouvait affecter mes chatons. Et personne n’avait de réponse. Alors j’essayais de rester positive, mais je ne pouvais m’empêcher de m’inquiéter pour eux, à chaque seconde qui passait.

« Toi aussi, ça te fait si peur ? »

Je crois qu’en parler avec une autre mère pourrait me rassurer. Ou pas. Je ne savais pas trop en fait, mais j’étais contente de discuter avec Audace des Cieux. Je l’avais haïe, apprentie. Je l’avais jalousée et haïe. Mais on avait grandi, et les querelles d’apprenti s’étaient estompées. Au fond, elle était sympa. Et j’étais heureuse qu’elle ait trouvé un compagnon avec qui elle était heureuse, elle aussi.

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