The essence of life is those we encounter along the way (pv : Dernier Corbeau)

Dernier Corbeau agissait comme tous les matins. Un quotidien assez morose, certes mais loin d'être désagréable. En ce moment, il s'interrogeait sur ce qu'il allait faire aujourd'hui. A vrai dire, il n'avait pas envie de participer à une patrouille, ce qui voudrait dire qu'il serait avec des chats qu'il n’apprécierait pas forcément. Et pour dire vrai, Ender n'avait pas envie d'être avec des lourdeaux se trouvant intelligents avec leurs blagues à deux balles. Surtout qu'il y aurait sûrement des apprentis avec. Oh, certes, le jeune chat n'avait rien contre les chatons... mais il n'aimait pas supporter des mentors "conseiller" leurs novices lorsqu'il s'agissait d'une mission sérieuse. Ou on les entraînait correctement avant et tout allait bien, ou bien on ne les faisait pas participer, mais on ne transformait pas une patrouille en exercice. C'était d'ailleurs comme ça que son ami Ombre Filante avait perdu de la confiance et lui et était considéré... comme un trouillard.

Se dirigeant vers le tas de gibier, Ender avait décidé qu'il allait "chasser". Bien qu'il n'était pas sûr de ramener plus de trois proies, qui auraient juste le but d'être un alibi. A vrai dire, le chat noir voulait tout simplement marcher, espérant rencontrer des personnes qu'il appréciait. Comme le chat gris et blanc précédemment cité ou sa meilleure amie. Voir n'importe quel autre personne qu'il ne détestait pas d'ailleurs. Fermant un peu les yeux en rencontrant le soleil, le guerrier choisis sa proie de manière à ce qu'elle ne soit pas trop grosse pour ne pas priver une personne plus affamée, ni trop petite sinon il ne pourrait pas se concentrer.

Dernier Corbeau vit le tas s’affaisser un peu à son côté opposé et pensait découvrir un autre guerrier. Malheureusement, ce n'était qu'un apprenti qui s'enfuit tous azimuts en le voyant. Il n'avait pas la permission, comprit Ender. Si la logique aurait voulu qu'il se dirige vers le petit pour le sermonner, le chat noir comprenait parfaitement ce que l'aspirant pouvait ressentir. Et il n'avait pas envie de perdre son temps avec ça, agir de cette manière ne contribuerait qu'à le fatiguer. De toute manière, songeait le chat, le mentor du jeune s'en rendrait bien compte. S'étirant, il quitta le camp et se dit qu'il allait rejoindre les arbres tordus, où il avait passé son examen d'apprenti.

Ce jour là, un de ses frères et une de ses sœurs, malgré qu'ils aient deux lunes de plus que leur cadet furent également promus. Malgré tout ce qu'Ender ressentait pour eux, une cette promotion fulgurante avant fait que le chat noir avait senti le regard brûlant de jalousie des autres apprentis sur sa nuque. Même s'ils s'entendaient bien. Même si la veille, ils couraient ensemble joyeusement. Cela avait changé imperceptiblement sa perception des gens, bien que Dernier Corbeau ne voit pas en quoi... Comme quoi, il comprenait mieux les autres chats qu'il ne se comprenait lui-même.

Une odeur vint alors chatouiller la truffe du mâle.  Odeur bien connue, d'ailleurs. Perle d'Odyssée. Qui était immobile. Mais que faisait-elle là? Ender se rapprocha doucement, et se coucha à côté d'elle, cherchant ses mots. Il voyait très bien que quelque chose n'allait pas. Puis doucement, il prononça des paroles qu'il avait hésité à dire :

-Tu sais, je t'admire.

Et pour l'instant, ce fut tout. Mais une réaction allait sûrement venir.

La jeune chatte grise avait encore les yeux clos, cachant ses belles iris noisette et verte pailletées de doré à la lumière. Des yeux que Dernier Corbeau connaissait très bien, pour les avoir vu de nombreuses fois. Des yeux qui au fil des lunes, n'avaient pas changé de couleur. Seulement d'expression, de temps en temps. Même lorsqu'ils étaient ensemble, même lorsque la joie et l'amusement devaient être la première émotion ressentie par Perle d'Odyssée, c'était comme si cela ne comptait que très peu. Quelques secondes après, la morosité et la tristesses se lisaient à nouveau.

Vous pouvez vous dire qu'Ender n'en savait rien, après tout, il n'était pas dans la tête de son amie. Mais il ne fallait pas oublier que les deux félins n'étaient pas de simple amis, en premier lieu. Non, c'étaient des meilleurs amis, ce qui signifiait beaucoup. Ils se connaissaient très bien, et se comprenaient. Et il ne fallait pas oublier que le chat noir n'était pas seulement un stratège, bien que d'autres personnes auraient pu penser que Perle d'Odyssée n'était pas simplement en train de faire un petit somme, mais qu'elle souffrait. Mais Dernier Corbeau comprenait très bien les autres, ce qui était à la fois une force et une faiblesse. Heureusement, il avait appris à oublier sa compassion lorsqu'il était en face d'ennemis.

Il lui suffisait d'imaginer son adversaire entrain de commettre d'horribles actes, contraires au code du guerrier. Tuer un chaton encore aveugle par exemple. Créer une situation en ce genre était un moyen simple d'oublier que l'âme des autres. Mais ce n'était pas ce qu'Ender faisait en ce moment, au contraire. Essayer d'entrer en communion avec la nature n'était pas simple, essayer la même chose avec un chat dont on ne connaissait que très peu l'histoire n'était pas plus aisé. Le jeune chat vit le soleil faire briller une larme sur la joue de la chatte qui était à ses côtés. Toutefois, il respecta pour commencer son envie de se montrer forte.

Il comprenait se sentiment, vu que le guerrier essayait toujours de cacher ses émotions derrière un masque de froideur. Un sourire forcé qui traduisait la douleur. Un sourire qui était si peu naturel, tellement marqué par rapport à ce qu'Ender connaissait d'elle. Cela lui fit mal. Que se passait-il pour dans l'esprit de la jeune chatte pour qu'elle paraisse si torturée. Il enroulait sa queue autour du dos de Perle d'Odyssée. Dernier Corbeau ignorait l'exacte nature des sentiments qu'il ressentait pour la chatte au pelage ayant des reflets bleus, mais il y avait plus que de l'admiration. En effleurant la joue de la guerrière du museau, il ouvrit la bouche et parla. Ender ne parlait pas très fort, doucement, mais avec tout de même des intonations fermes.

-Je t'admire parce que tu es forte. Tu souffres en silence, ce qui me fait croire que tu as plus de peine encore que ceux qui pleurent pendant des jours avant de s'arrêter net et de passer à autre chose. Mais tu sais, je préfère te voir heureuse, et si je peux t'aider en te soulageant un peu, n'hésite pas.

Le sous-entendu était clair et son regard aussi. "Tu peux tout me dire, je ne te jugerais pas, je serais juste là pour essayer de te consoler". Allait-elle saisir cette occasion? Dernier Corbeau ne la forcerait pas, évidemment, mais ne pas faire cette proposition serait... Manquer à son devoir? Non, ce serait plus profond, mais Ender ne pourrait pas mettre de mots dessus. Il n'était pas doué sur ce plan là.