Le premier entraînement d'un Nuage. (PV Nuage Imaginaire)

Une légère caresse me tira du monde des songes. J'ouvris mes deux saphirs et croisai le regard pénétrant de Plume Éternelle. Au début, je me demandai en quelle honneur une guerrière venait à la pouponnière, me réveiller, à moi, pauvre petit chaton. Puis, comme un flash, je me remémorai la journée qui avait précédé. Le chef du clan avait demandé à ses guerriers de se rassembler afin de célébrer un baptême. Et ce baptême, c'était le mien. J'avais mis un moment à assimiler mon nouveau nom composé de Nuage. Et ce matin, je n'avais pas pensé une seule seconde que c'était mon mentor qui venait me réveiller pour partir en entraînement. Je n'entendis pas toutes ces paroles, mais les mots « territoire » et « toilette » suffisaient à me réjouir. Je pris un certain temps pour observer mes camarades dormir dans leurs litières. C'était à la fois excitant et étrange de dormir avec eux alors que je les enviais quelques jours plus tôt. Je lâchai un bâillement et étirai mes os ankylosés. J'avais fait ma litière à la va-vite hier soir et je devais vraiment songer à la perfectionner si je voulais suivre les entraînements sans passer pour un ancien. Je remarquai un campagnol particulièrement dodu posé devant ma litière. Je clignai des yeux, regardant autour de moi. Aucun autre apprenti ne semblait vouloir le manger. Je remerciai silencieusement ma mentor et l'attaquai. Des forces pour mon premier entraînement, il m'en faudrait ! Tout en dégustant le rongeur, je pensais qu'il fallait obligatoirement que j'en ramène un aujourd'hui pour compenser avec les anciens. Je dévorai les derniers morceaux de l'animal et me léchai mes babines. Je suivis le conseil de ma mentor et entrepris une toilette brève. J'allais me salir aujourd'hui, je n'avais pas vraiment besoin de pousser. Je sortis de la tanière réservée aux apprentis et accueillis avec joie les doux rayons du soleil qui me réchauffaient. Je laissai le temps à mes pupilles de s'habituer à la luminosité et balayai le camp du regard. Beaucoup de félins étaient encore en train de dormir et la patrouille de l'aube faisait son rapport au chef du clan. Le tas de gibier semblait déjà garni, signifiant l'arrivée de la saison des feuilles nouvelles à grand pas. Enfin, je posai mon regard sur la jeune guerrière qui allait m'entraîner tout au long de ma vie d'apprenti. Elle était magnifique, blanche comme la neige à étinceler au soleil. J'étais fier d'être son apprenti. Je ne connaissais pas vraiment la féline, mais au premier regard, elle semblait sympathique. Je me dirigeai vers cette dernière et la saluai avec un mouvement bref des oreilles.

« Salutations, Plume Éternelle. Je te suis, j'ai hâte de commencer mon entraînement ! »

Je m'assis près d'elle et attendis ses instructions, ne voulant pas paraître mal poli dès le début. L'excitation et l'impatience de débuter mon apprentissage bouillonnaient dans ma veine. J'avais envie de grimper sur le promontoire et crier au monde ô combien heureux j'étais. Après toutes ces lunes emprisonné dans la pouponnière à envier les apprentis, j'étais récompensé.

« Bien, nous allons commencer par le tour du territoire, j’espère que tu as bien dormi car nous allons marcher longtemps. Allez, suis moi. »

J'hochai la tête et me relevai, étirant mes pattes et chassant la dernière once de fatigue qui parcourrait mes veines. J'étais prêt. Je laissai Plume Éternelle se lever et trottiner vers le tunnel d'ajoncs. Je ne pus m'empêcher de sourire en voyant la jeune guerrière ainsi, toute joyeuse. Avoir un apprenti semblait réellement la rendre heureuse et, ainsi, j'étais heureux. Je lui emboîtai le pas, non sans trottiner gaiement. Dans quelques minutes, j'allais être en dehors du campement et ce, pour la première fois de ma vie. J'étais impatient et une envie irrésistible de courir me prenait. Mais je devais respecter mon mentor et donc le laisser devant. Nous arrivâmes près du tunnel d'ajoncs. Déjà, les effluves semblaient différentes et les sensations inédites. Le passage entre le camp et la forêt fut tellement bref que je mis un instant à me rendre compte que je l'avais franchi. Mais ma mentor ne me laissa pas le temps d'apprécier ce sentiment. Une pente abrupte se dressait devant nous, ce qui eut le don de m'effrayer quelques secondes. Elle semblait difficile et sinueuse pour un apprenti si peu expérimenté comme moi. Mais je n'en dis rien à Plume Éternelle. Cette dernière me fit un signe de la queue et elle arpenta la pente avec une habilité déconcertante. J'eus un moment d'hésitation et pris mon courage à deux pattes, essayant tant bien que mal d'imiter les positions de la guerrière.
A ma grande surprise, j'étais arrivé en haut de la pente, sain et sauf, sans même une seule égratignure. Et je n'étais pas tombé une seule fois. Je vis mon mentor se poser, nous laissant le temps de récupérer. Effectivement, j'étais plutôt essoufflé. Après avoir récupéré une partie de mon souffle, je me mis à observer la forêt. Ma forêt, désormais. L'image qui s'offrait à moi était parfaite. Les arbres qui occupaient l'espace n'étaient pas encore tout à fait verts, laissant peser une once de magie. Ils étaient hauts, grands et dominaient la forêt avec une puissance déconcertante. Enfermés dans le camp, on ne voyait pas ces êtres majestueux. Leurs branches virevoltaient au gré du vent, ce qui me valut un frisson. Il ne faisait pas chaud, mais l'air était agréable et avec nos fourrures, nous n'avions pas froid. Au loin, je pouvais voir des clairières se dessiner, illuminées par les quelques rayons de soleil qui parvenaient à s'infiltrer parmi les feuilles des arbres. On ne voyait pas la ville, on ne voyait pas les territoires des autres clans. Non, on voyait la forêt du clan du Tonnerre, on voyait notre maison. J'esquissai un sourire et me laissai emporter par les douces senteurs de cette forêt. Il y avait une odeur que l'on ne sentait pas lorsque l'on était au campement, et elle avait quelque chose d'agréable. Je ne saurais la décrire très exactement, mais c'était magique. Je posai mes deux saphirs sur la silhouette fine de mon mentor. Cette dernière se retourna.

« La descente sera un peu plus complexe, suis moi à la trace. »

J’acquiesçai, bien que celle-ci ne prit pas le temps de voir si j'étais d'accord ou pas. La féline se mit à dévaler la pente, s'engageant dans un chemin maladroitement dessiné. J'écarquillai les yeux, légèrement apeuré par la perspective de m'engager dans une descente. Je pris une grande inspiration, ne voulant pas mettre mon mentor en retard, ou ne voulant pas la laisser croire que j'étais trop faible. Je contractai les muscles de mes pattes, espérant qu'ils ne me lâchent pas. Je finis par arriver près de Plume Éternelle et j'étais surpris d'apprécier cette sensation. La fourrure au vent, le doux parfum de la forêt remplissant mes poumons à chaque pas. Mes pattes frôlaient à peine le sol, me procurant l'agréable sensation de vol. Obnubilé par toutes ces nouveautés, j'en oublis de contrôler mes pattes qui n'étaient pas du tout habituées à tout ça. Je manquai de tomber et me laissai rouler sur le côté, essayant de limiter les dégâts. Je me redressai, la tête me tournant légèrement. Je vis Plume Éternelle me rejoindre mais si elle me parlait, je ne l'entendais pas. Je pris quelques secondes avant que l'ouïe et la vision ne me reviennent et pris le temps de tester mes réflexes. Mes pattes étaient toujours utilisables et je n'avais rien de casser. Juste beaucoup de peur. Je lançai un regard empli de culpabilité à mon mentor.

« Je... je.. balbutiai-je encore un peu sonné, je suis désolé, Plume Éternelle. Je n'ai pas fait attention à mes pattes... je... excuse-moi, je ferai attention désormais. »