Danger, chat furax, veuillez garder votre calme. | PV. Faucon Embrasé & Shameï

Le soleil se levait paresseusement sur la forêt. Ses doux rayons effleuraient les feuilles des arbres qui commençaient, peu à peu, à adopter une belle couleur verte. Les bourgeons avaient éclos depuis un moment et quelques fleurs pointaient de çà et là, et le vent secouant les branches apportait un parfum délicat et sucré. Les oiseaux pépiaient, sans doute heureux également de voir le retour du beau temps. Le gibier, quelques temps auparavant terré dans son terrier, sortait déjà pour profiter du soleil et du climat. La rivière, à nouveau libre, clapotait et les poissons, qui étaient au comble du bonheur, refaisaient surface. Les membres du Clan de la Rivière n'en demandaient pas plus, et on voyait à leurs pelages brillants et à leurs ventres de plus en plus gros qu'ils ne se gênaient pas pour festoyer chaque soir. Leur arrogance n'en était plus qu’agaçante. Les membres du Clan du Vent, même s'ils étaient toujours maigres, semblaient également se réjouir du retour des lapins dans la lande. Le Clan de l'Ombre aussi reprenait du poil de la bête, sans doute un mauvais signe pour la sécurité des frontières. Le Clan du Tonnerre aussi se réjouissait du retour du gibier, une constante bonne humeur planait dans le camp, accompagnée de jeunes chats qui couraient en tous sens et de cris joyeux qui fusaient de çà et là. En fait, toute la forêt était au comble de la joie d'avoir retrouvé le beau temps, de revoir la saison des feuilles nouvelles.

Sauf moi. Evidemment, me diriez-vous. Tous ces cris, cette agitation, c'en était trop, vraiment insupportable à longueur de journée. Pourquoi, osez me demander pourquoi ! Pendant la saison des neiges - aussi appelée mauvaise saison, et ce n'est pas pour rien - qui est-ce qui a travaillé dur, qui s'est levé chaque matin de bonne heure, qui a participé à un maximum de patrouilles, qui a chassé à longueur de journée pour apporter au clan les proies nécessaires à sa survie, hein, qui s'est battu pour garder un clan en pleine forme hein ? Ne cherchez pas la réponse plus loin. Parce que, qui pendant ce temps, a profité de la chaleur des tanières ? Tous ces paresseux, tous ces fainéants qui n'avaient guère travaillé pendant la mauvaise saison, et bien tous ceux là se réjouissaient de la nouvelle saison, et ils osaient se plaindre d'un hiver rude et long ! Mais qu'y avait-il au monde de plus agaçant, de voir ses efforts ignorés, balayés, jetés comme une simple poupée de chiffon, hein ? Sans compter les anciens grincheux qui ne cherchaient qu'à critiquer le travail des autres, mon travail. Et les chatons qui n'avaient rien de mieux à faire que de vous harceler toute la journée pour leur apprendre des techniques et ruses de combat ! Quoi de plus énervant que tout cela ! Il fallait décompresser, il fallait que je relâche un peu la pression avant d'exploser. Oui, avant de laisser ma colère l'emporter sur ma raison. Je soupirai. Allez, changeons-nous un peu les idées.

Je me levai délicatement. Non, je n'avais pas dormi au camp. Que croyez-vous, hein ? Je n'aurais pas supporter un moment de plus en compagnie de cette folle agitation ! De plus, certains guerriers ronflaient en ce moment, et je le vivais mal, très mal. D'autant plus que récemment, Etoile Flamboyante m'avait nommé pour lui succéder. Oui, enfin, enfin un peu de reconnaissance. Cependant, je préférais la jouer discret, modeste loyal plutôt que sévère, strict, et toujours à rabrouer les autres. Autant bien se faire remarquer, non ? Ce travail supplémentaire m'harassait encore plus qu'ordinaire. Donc, pour une nuit tranquille, j'avais organisé à l'avance les patrouilles et avait passé ma nuit... Aux Rochers du Soleil. Le beau temps était de retour, autant en profiter. Ce fut la douceur du soleil qui m'avait réveillé. Et repenser au Clan du Tonnerre m'avait on ne peut plus, énervé. Chancelant, je descendis des pierres que le soleil réchauffait, et je m'approchai d'un hêtre. Je regardai l'arbre quelques instants. Il allait regretter d'être au monde, celui là ! Il allait regretter que je l'eus choisi pour me décontracter. Ainsi, je sortis mes griffes et, tout en m'étirant, déchirait l'écorce encore fine, faisait voler en éclat l'écorce qui pendouillait de l'arbre. Un peu plus décontracté, je décidai de faire un petit tour en m'arrêtant...

Aux Quatre Chênes. Non pas que cet endroit, sacré aux yeux des autres, m'intéresse, c'est parce que j'y avais fait de nombreuses rencontres, et pas des moindres. Un peu plutôt, j'avais fais la connaissance de Nuage de Vie, apprentie du Clan de la Rivière, et je m'étais aperçu que sa vision des choses était semblable à la mienne. Et j'avais également eu la déception de me rendre compte que ce n'étais pas le cas de Plume de Buse, guerrier du Clan de l'Ombre, qui s'étais rebellé. Ainsi je lui avais sauté à la gorge. Mais non, ne vous en faites pas, il est reparti comme si de rien était. Enfin presque. Mais c'est tout. Il s'étais enfui comme un trouillard, même si je ne pense pas qu'il ait rapporté quoi que ce soit de l'incident à son Clan, non, il était bien trop terrifié. Je m'ébrouai pour chasser ces drôles de pensées, si puis-je dire. Je commençai à galoper à travers la forêt, foulant la douce mousse qui recouvrait le sol. Sans m'en rendre compte, j'étais déjà aux Quatre Chênes. Que faire, maintenant, me demanderiez-vous ? Eh bien, attendre. Et je m'assis tranquillement, la queue enroulée autour de mes pattes, attendant, patientant....