Welcome to the Masquerade - Salem

Feat Salem

Rune défiant la Mort marchait, reniflant les odeurs de possibles intrus parmi celle des fleurs qui embrassait le ciel de leurs corolles colorées où que son regard se pose.
Les terres de la Troupe Inondée s'étendaient toujours plus loin au fur et à mesure que les chasseurs découvraient de nouveaux lieux et s'aventuraient toujours plus loin dans les terres qu'avaient laissés leurs ancêtres de la Terre et de l'Eau, mais de telles longueurs de territoire laissaient parfois passer des intrus et notamment les terribles Escogriffes.
En tant que chasseur, Rune faisait une patrouille solitaire pour vérifier que personne ne franchissaient les frontières et ne pouvait mettre en danger les plus jeunes et faibles de la Troupe et, en même temps, il se retrouvait avec lui-même, loin de la forêt où il partageait les murmures des Pères et Mères de l'Eau et de la Terre.
Dans son dos, entre ses épaules, il sentait la peau nue et brûlée se tirer à chacun de ses pas, souvenir de la grande bataille entre les Clans et Troupes contre les Escogriffes et ça, ainsi que la cicatrice en forme de croissant de lune sur son épaule gauche, l'incitait à se méfier des chats sans foi ni loi qui s'amusaient à traverser leur territoire en se moquant des marquages et des règles qui régissaient sur le territoire de la Troupe. Il y avait une autre raison pour laquelle Rune patrouillait ainsi. Se retrouver capturé et enfermé dans une des cellules de la Prison lui avait fait prendre conscience de la frustration immense qu'il ressentait en étant impuissant à agir et parcourir les terres de la Troupe en s'assurant de la sécurité des siens lui permettait de se sentir utile et de lui donner un but.
Il s'arrêta un instant dans un cercle de coquelicot et profita de l'odeur douce des fleurs charriée par le vent dans sa fourrure. Il était triste qu'il doive se donner un but pour se sentir utile. Il était triste qu'il se sente si seul dans sa propre Troupe qu'il en vivait au jour le jour, gardant toujours la tête basse pour ne pas effrayer ses camarades en les regardant dans les yeux. 
Sa mère avait été fière de le voir grandir, prendre des épaules et avoir des pattes massives qui lui permettait d’assommer un lapin d'un seul coup. Pendant ses jeunes lunes de chasseur, lui-même avait été fier de sa carrure imposante, du grondement de tonnerre dans sa voix lorsqu'il parlait et du gris perçant et hypnotisant à la fois de son regard, mais cela faisait bon nombre d'autres lunes qu'il avait apprit à détester ce qui faisait de lui l'un des chasseurs les plus impressionnant et impressionnant de sa Troupe.
A quoi bon avoir une allure imposante si elle faisait fuir tout le monde autour de lui ? Et à quoi bon avoir une voix grave, profonde et parfois menaçante si c'était pour la laisser mourir dans sa gorge, sans possibilité de discuter avec qui que ce soit ?
Son caractère doux en prenait un sacré coup et, un jour comme celui-ci, où il était bon vivre et se balader sur les terres immenses et magnifiques de la Troupe, il aurait aimer plus que tout avoir quelqu'un avec qui fouler le sol et apprécier les couleurs flamboyantes des fleurs.
Rune poussa un soupir en se remettant en route. Qui pourrait l'apprécier de toute façon ? Même si un chat arrivait à faire abstraction de son apparence, son masque de neutralité et tous ceux qu'il s'était créés pour se donner l'air qu'on attendait de lui finiraient par faire fuir l’intéressé. Personne ne serait capable de tenir en sa compagnie le temps de briser chacun de ses masques. 
Qui en aurait envie de toute façon ?
Le chasseur au long pelage planta ses griffes dans le sol, retenant sa frustration. Le vent charria une nouvelle vague d'odeur qui lui parvint et il se redressa instantanément en y respirant une odeur féline qui n'appartenait pas à un membre de sa Troupe.
Il rétracta les griffes. L'odeur n'était pas non plus celle des Escogriffes alors seul un solitaire pouvait fouler la terre de la Troupe et, les connaissant, il n'aurait besoin que de quelques mots pour le faire partir d'ici.
L'odeur étant proche, il ne prit même pas la peine de chercher le matou et lança d'une voix qui portait dans le vent :
- Solitaire, tu es sur le territoire de la Troupe Inondée et tu n'as rien à y faire. Je te prierais de partir.
L'intrus lui apparut entre deux fleurs et Rune se dirigea vers lui, s'arrêtant à une longueur de queue à peine du chat à la fourrure noire comme la nuit.

© Kinotto de LG.

Feat Salem

 « Take a look around at the sea of masks and come one. Come all, welcome to the grand ball, where the strong run for cover and the weak stand tall  »

Le solitaire était plus grand que Rune ne l'aurait cru et ses paroles résonnèrent comme un reproche à ses oreilles.
Sans même chercher à se défendre de sa présence sur le territoire de la Troupe ou s'excuser, il tourna le dos au chasseur gris et massif, écrasant plus qu'écartant les fleurs sur son passage, déjà prêt à repartir.
C'était ce que Rune voulait à la base, bien entendu, mais entendre l'éclat de tristesse du grand mâle noir lorsqu'il avait donner son ordre froid et le voir s'éloigner aussi vite lui fit du mal. Il n'avait déjà pas beaucoup d'occasion de discuter avec quelqu'un, encore moins d'apparaître différemment que le chasseur puissant et terrifiant que la Troupe voyait en lui et voilà qu'il se comportait exactement comme tel. Il se sentit honteux de sa conduite en même temps que triste de faire fuir un chat qui, visiblement, était totalement pacifique et n’enfreignait aucunes lois de la Troupe.
- Attend, lança-t-il de sa voix grave ou ne perçait plus qu'un désir de le retenir. Je... Pardon. Des membres de ma Troupe ont été enlevés encore récemment par des chats qui vivent dans et en-dehors de notre territoire et je suis encore un peu à cran à leur sujet. Tu n'as pas besoin de subir les conséquences de leurs actes...
Il se tut un instant. Il ne mentait pas, mais ne disait pas la vérité totale pour autant. Il était de mauvais poil, certes, mais la présence des Escogriffes près des territoires de la Troupe n'était pas tout à fait la raison pour laquelle il se trouvait être aussi mauvais contre un étranger qui n'avait absolument rien fait. Alors qu'il n'aurait jamais dévoilé ça à qui que ce soit de sa Troupe, il lança au solitaire noir, presque nonchalamment.
- C'est un mauvais jour, je m'excuse encore. Si tu veux, tu peux rester ici un instant pour te reposer et même te restaurer si tu le souhaites. En ma compagnie, tu es sous la protection de la Troupe Inondée et aucun membre de ma Troupe ne viendra te chercher des puces si tu souhaites chasser un peu.
Il essayait de se faire plus doux qu'il ne l'avait été l'instant précédent mais il avait la désagréable impression que sa voix le trahissait en se faisant aussi grave et grondante dans sa gorge. Il n'avait jamais apprécié sa voix de toute façon, celle-ci même qui faisait trembler et fuir les plus jeunes qui osaient venir le voir. Celle-ci même qui faisait fuir tout ceux qui osaient l'approcher. Et, pour une fois, il devait bien admettre qu'il n'avait aucune envie de faire fuir celui qui se trouvait en face de lui.

© Kinotto de LG.