Hé oh ! Tu vas où toi ? [Ft Ocy]

Je vais où je vais

Ft. Doudou

Je comprends pas. Je devrais être apprentie, c'est sûr ! Mais... Pourquoi je ne le suis pas ?
J'ai pourtant bien six lunes, non ? Et puis, il me semble que je n'ai pas fait de bêtises qui puissent empêcher mon baptême. Enfin, je crois. Peut-être qu'Étoile de Jaspe pense que je ne mérite pas d'être nommée novice ? Ça serait bizarre vu que Petit Soleil est toujours Petit Soleil, lui au moins est apprécié par tous les "grands" guerriers...
Il est tard et je ne dors toujours pas. Ces derniers temps, j'ai du mal à tomber dans les bras du sommeil -oui je sais, je suis poète-. Le froid y est sûrement pour quelque chose... L'agacement aussi. Et l'impuissance. Et puis l'impatience. Plein de sentiments. Et si papa voulait retarder le baptême pour entraîner encore plus Petit Soleil,
qui deviendrait ainsi guerrier bien plus rapidement que moi et qui m'abandonnerait à mon triste sort ? Non, c'est impossible. Jamais il ne ferait ça. C'est mon père quand même, il n'est pas aussi cruel... Je crois.
Ma petite tête est toujours comme ça, à chercher les problèmes, les mauvaises choses. Je m'imagine toujours le pire, et ça commence à me faire mal. Je dois arrêter. Ça ne sert à rien, tout ça n'arrivera pas.  

Petit Soleil s'agite à côté de moi. Agacée et surtout sûre de ne pas m'endormir, je prends une grande décision :
je vais sortir d'ici, sortir de la pouponnière, sortir de cette connerie de camp dans lequel je suis restée enfermée depuis ma naissance, à quelques exceptions prêtes. Je me lève d'un bond, désormais toute excitée, oubliant pendant quelques instants qu'il ne fallait pas qu'on ne me voit; néanmoins, je me rattrape et commence à avancer discrètement vers la sortie, jetant des regards inquiets en direction de ma mère. Puis, sans plus attendre, je me faufile dans la petite sortie.
Dehors, il fait frais; un vent léger souffle sur mon pelage et je ne peux m'empêcher de trembler. Le ciel est noir, ou plutôt bleu très foncé, plein de petites étoiles. Le silence est percé par moments par une bourrasque, un cri d'oiseau, un bruissement de feuilles... Un hululement sonore remplit l'air, me faisant sursauter. Le cœur battant à cent à l'heure, je ferme les yeux quelques secondes,
sachant pertinemment qu'avoir peur de ça n'est pas digne de la guerrière que je suis.
J'ai trop tardé, il faut que j'y aille, quelqu'un va finir par me trouver ! Un petit coup d'œil aux alentours pour vérifier que la voie est libre et déjà, j'avance vers la sortie. J'essaye de faire le moins de bruit possible, on ne sait jamais... Je crois que c'est plutôt réussi ! J'y suis presque, je parviens à voir le bout. Encore une queue de renard et...

« Petite Aube ? »

Je me fige. Non. NON ! Ce n'est pas possible, comment avait-on pû me remarquer ! Je pensais avoir tout fait comme il le fallait ! La cadence de mon cœur s'accélère encore, déjà plus rapide que d'habitude. Je n'ose pas bouger; si ça se trouve, la personne qui m'a "vu" peut penser que je suis une hallucination...

«  Tu m'expliques ce que tu fais debout à cette heure ? »

Visiblement, c'est raté ! Je me relève d'un bond, les yeux plein de colère et de déception, envers lui, ce guerrier,
et envers moi-même qui ne suis bonne à rien, même pas de sortir discrètement du camp. Petit Soleil aurait fait mieux. Il aurait réussi, il n'y en a aucun doute. Je lève mes yeux vers ceux du félin qui se trouve devant moi; dans le noir, il n'est pas facile de distinguer qui est qui, mais je parviens à le reconnaître : c'est Épine de Cactus, un guerrier fort et expérimenté que je pensais gentil. Eh bien plus maintenant !
J'en ai marre.

« Je veux sortir. J'en ai marre d'être enfermée au camp, de pas pouvoir sortir alors que je devrais déjà être apprenti. J'en ai marre d'être toujours inférieure à tout le monde, d'être capable de rien. J'en ai marre marre marre ! »

Je sais pas pourquoi je dis ça comme ça, maintenant, devant lui. Trop plein je pense.
Mon cœur s'agite, c'est très étrange, je n'ai jamais ressenti ça. Il palpite, je sens les battements dans mes oreilles.
Un filtre passe devant mes yeux, tout se trouble.

Elle s'écrase sur le sol.

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