ft. Luny

Je brûle, à l’intérieur. Ça a toujours été ainsi. Il y a ce feu destructeur qui tape contre mon front et circule dans mes veines en permanence. Une force sombre qui ne demande qu’à sortir de mon être. Qu’à s’échapper. Alors elle se déchaîne, laisse déferler son pouvoir dans mon sang. Je n’ai jamais rien connu d’autre que ce besoin destructeur. Vivre pour moi ne se résume qu’à lui. Qu’à cette rage. Je ne suis jamais en paix. Je ne connais pas la paix. Je ne l’ai jamais connue, alors elle ne peut manquer. La paix me paraît si fade. Si monotone, si ennuyante. Je ne veux pas de cette paix. Ma guerre est bien plus vivante.

Je ne connais personne qui vit pleinement sa paix. Enfin, je ne connais pas grand monde non plus. Petite Azurite serait probablement celle que j’estimerais mieux connaître, et encore. Et elle non plus ne connaît pas la paix. Enfin, elle est toujours là à se tracasser pour rien, à s’inquiéter pour les autres, pour moi, pour Petit Fjord, pour Papa et Maman, pour les autres chatons… Bref, pour tout le monde. Et pour elle en dernier. Elle ne s’inquiète pour elle qu’à la fin. Qu’après tout le monde. Elle est n’est pas assez égoïste. Pas assez, pas du tout, même. Elle ne fera jamais passer sa personne avant les autres. Avant ceux qu’elle aime, avant ceux auxquels elle tient. Ça la tuera, un jour, si ça n’a pas déjà été le cas.

Je n’ai pas l’impression de partager un lien spécial avec Papa et Maman. Ni avec l’un, ni avec l’autre. Ils ne sortent pas du lot. Ils ressemblent à n’importe quels parents banals. Je ne suis pas attachée à eux, et je ne le serai jamais. Avec Petite Azurite, c’est différent. Il y a quelque chose de différent chez elle, quelque chose qui n’est pas lié au simple fait qu’elle soit ma sœur. Quelque chose de plus profond, quelque chose d’ancré au fond de moi. Un lien invisible. Son caractère fonctionne comme un aimant avec le mien. Il existe une alchimie spéciale. Un lien intime. Ce lien qui fait que je me sens plus proche d’elle que de n’importe qui. Et pourtant, nous sommes si différentes. Nous ne fonctionnons pas pareil, nous ne pensons pas pareil. Nous n’avons quasiment rien en commun.

Et pourtant, elle a l’air de compter pour moi. Je saurais pas comment l’expliquer, mais je l’apprécie. Il y a quelque chose chez Petite Azurite qui me donne envie de partager certains moments avec elle. Par exemple, la taquiner sur le fait qu’elle passe ses journées à observer Étoile Fragmentée, ça, ça me fait marrer. Parce que déjà, j’adore apercevoir cette lueur d’effroi dès que j’évoque le sujet. Un sujet sensible, évidemment. Sensible pour elle. Elle a une obsession avec le chef que je ne comprends pas. Elle a ses tics étranges à propos desquels j’aime la voir paniquer. Et justement, j’en parle parce que c’est le cas. C’est toujours le cas.

“Alors ? Toujours en train de matter ?” Et ma voix raillant sur ces mots.