Aidez-moi ! Je suffoque ! Ft. Luny

Tout était étrange. L’air était étrange. Les odeurs étaient étranges. Tout de l’étrange se succédait et c’était sûrement pour cela que le petit chaton n’Avait pas réagi, parce qu’il était aussi dans l’étrangeté. Il était étrange lui aussi, alors pourquoi chercherait-il à fuir l’étrange? Il était dans son élément. Mais il ne savait pas que c’était totalement faux, que c’était même le contraire complètement. Le feu ravageait le camp. Les chats sortaient. Fuyaient. Quand soudainement un miaulement apeuré parvint à ses oreilles. Sa mère. Ses sœurs. Son père. Ils étaient là. Et Patte Enchantée ne posa pas de questions. Il n’avait pas peur, mais il avait senti l’urgence de la situation et il n’avait pas cherché à en savoir plus, il avait fui avec sa famille qu’il ne considérait sans doute pas correctement. Parce qu’une famille, tu l’aimais. Mais lui, il leur était totalement indifférent. Sans doute parce qu’il ne savait pas ressentir. Le petit chaton ne savait pas du tout comment on ressentait les émotions. Il ne savait pas ce qu’était le fait d’aimer, ce qu’était le fait de détester. Il savait juste ce qu’était le fait de dominer, parce qu’il savait que dominer était son domaine et qu’il le faisait bien. Même très bien.

Il dominait toujours sa sœur. Il lui donnait des ordres. Le chaton était ainsi. Il dominait toujours. Que ce soit durant les jeux ou alors quand il s’agissait de la vie simplement de sa plus petite sœur, Petite Ambre. Il lui donnait des ordres qui ne devaient en aucun cas être contestés parce qu’autrement lui, il s’énervait. Parce que le petit détestait qu’on conteste son autorité et ce qu’il disait, ordonnait. Sans doute que la chatonne l’avait compris parce qu’elle ne s’opposait que très rarement ouvertement et publiquement à son frère, se laissant faire par lui. Et il aimait ça. Il aimait même plus que ça. Sans même savoir qu’il aimait ça. Oui, c’était sans doute bien étrange, mais c’était ainsi.

Donc. Il avait fui. Sans poser de questions. Il n’en posait jamais de toute façon. Il ne parlait presque pas. Il ne parlait limite jamais. On pouvait le qualifier de muet, parce qu’aucun chat n’avait réellement entendu sa voix. Pas concrètement. Sauf sa sœur. Parce qu’il parlait quand il s’agissait de lui donner des ordres et il en donnait beaucoup, à cette petite chatte. Il se foutait qu’elle le veuille ou non, il le faisait. Il le ferait sans doute toujours jusqu’au jour où il n’existerait plus. C’était ainsi et il ne changerait certainement pas pour faire plaisir au monde, aux gens. Silencieusement, il avait cheminé aux côtés de ses parents et de ses sœurs, la fumée l’avait fait tousser à quelques moments, mais rien de grave. Ils avaient évité le pire en réagissant rapidement. Mais à un moment, sans qu’il ne puisse dire pourquoi ou comment, il se trouva seul. Entièrement seul. Au milieu des flammes si hautes, bien plus que lui. Mais il ne paniquait pas. Il resta longuement là. Il patientait.

Même si les flammes se rapprochaient de lui. Et il eut bien fait, parce qu’il n’aurait pas vu la brèche se formant autrement. Et quand elle s’était formée, il s’y était engouffré. Il ne savait pas où il allait. Il savait juste qu’il se dirigeait quelque part pour échapper au feu parce qu’il ne désirait pas mourir, non. Il voulait continuer de vivre et donner des ordres à sa sœur, diriger la vie de cette dernière. Et peut-être devenir meneur un jour. Il ne se disait pas qu’aucun meneur ne le choisirait en tant que lieutenant à cause de son comportement non, il n’y pensait même pas. Pour lui, le poste était aussi accessible pour lui que pour les autres. Mais ce n’était même pas sûr qu’il devienne guerrier ainsi alors…

Il eut étrangement de la chance de ne pas tomber dans ses pensées. Sans doute que la présence du feu prêt à le manger à tout instant le fit avancer sans même un seul instant être traversé par une pensée le figeant. C’était sûrement ça, parce qu’il était rare que Patte Enchantée ne pense pas durant un si long laps de temps. Et il finit par s’arrêter. Il était quelque part. Quatre chênes s’élevaient devant lui. Et l’odeur de plusieurs chats lui parvenait. Il ne parvenait pas à les identifier. Aussi décida-t-il de chercher sa sœur pour voir ce qu’elle faisait et s’assurer qu’elle ne traîne pas avec le novice, Nuage d’Ébène. Elle aimait ce chat, ça se voyait. Elle n’y était pas indifférente du moins. Mais ça, il ne pouvait pas réellement le savoir puisqu’il ne savait pas ce que c’était d’aimer réellement. Et il ne savait pas grand-chose en fait, sur les sentiments. Il ne savait rien décidément et il ne chercherait jamais à en savoir quelque chose, ce n’était pas de ses affaires à lui, il ne ressentait pas alors ça ne le concernait pas.

Et alors qu’il cherchait sa sœur, il s’arrêta, se perdant dans ses pensées. Mais il revint vite à la réalité. Et quand il revint à la réalité, une chatte de la taille de… de sa sœur quand ils étaient beaucoup plus jeunes, se tenait devant lui. Il ne l’avait jamais vu. Son odeur ne lui disait absolument rien. Il ne savait absolument rien de cette chatonne. Elle était un mystère pour lui. Comme il était sans doute un mystère pour elle. Drôle de coïncidence, car même s’il ne le savait pas, le nom de la petite était Patte Mystérieuse. Elle lui demanda s’il avait perdu sa mère. Ou quelque chose dans ce style, ce baratin. Pourquoi chercherait-il sa mère? Il se foutait de sa mère, de son père. Patte Enchantée ne dépendait plus d’eux, pourquoi devrait-il les chercher ainsi? Il inclina la tête. La seule qu’il cherchait était sa sœur parce qu’il voulait s’assurer qu’elle ne soit pas avec celui qu’il lui avait interdit de fréquenter. Ce n’était que pour cette raison qu’il la cherchait. Et un silence se fit entre les deux chatons seuls. Il finit par le briser. Miraculeusement. Bien qu’il n’était pas… logique?

« Non… ma sœur. »