Provisoire

Il allait le tuer.

Ce n'était pas une option, pas même un choix, c'était une évidence pure et simple qui ne permettait pas d'autres options. Une évidence qui hurlait de son caractère inévitable et clamait sa présence de par la colère vibrant dans toutes les fibres de son corps. Il tremblait. Des moustaches jusqu'au bout de la queue. Les tremblements étaient violents, brusques, le rendant encore plus hors de lui. Un tel courroux ne pouvait finir que dans le sang. Il était en dehors du camp. Il ne pouvait pas rester là-bas, pas maintenant, pas dans un tel état, craignant de s'en prendre involontairement à qui que ce soit. Parce que les membres du Clan de l'Ombre n'étaient pas l'objet de sa fureur. Du moins, en partie, puisque celui qui l'avait provoqué faisait bel et bien partie de ce Clan. Seulement, tout le monde ne devait pas payer pour l'ignorance et l'arrogance - la stupidité surtout - d'un seul chat qui se croyait tout permis. Ce n'était pas quelque chose qui se faisait, et le félin roux et blanc le savait. Il demeurait gentil, tout au fond, quelque part dans son coeur et dans son âme, il demeurait gentil. Même si ça se voyait pas. Surtout pas maintenant, en ce précieux instant où la colère prenait toute la place.

Il allait le tuer.

Il ne voulait pas que ça se passe autrement, que cette cervelle de souris trouve le moyen de s'échapper à cette funeste sentence. Cri de l'Agonie refusait toute birfucation à son plan, bien que ce ne soit pas tant un plan qu'un désir ardent dans son coeur. Il ne voulait pas que ce guerrier en ressorte vivant de leur affrontement. Il ne fallait pas croire qu'il était un meurtrier, un assassin parfaitement entraîné qui savait ce qu'il devait faire, comme faire aussi, ce n'était pas le cas. Il n'avait jamais pensé qu'il pourrait faire ça, tuer, enlever la vie d'un autre, non, ça ne lui était jamais venu à l'esprit. Il n'était pas un meurtrier, mais il allait le devenir. Pour elle. Pour la venger elle. Les autres appeleraient sûrement ça un crime obscur et passionné, dirigé par un amour fou. Pour lui, ce n'était rien de plus qu'une offense qui allait être payée. Rien de plus que tout ça. Il s'étira longuement et respira profondément pour ne plus, ne plus trembler. Il y arrivait à grande peine.

Il savait.

Il savait que son ennemi qui s'était cruellement inscrit pour toujours dans sa tête allait venir dans la patrouille qui viendrait bientôt. Il avait appris le trajet fait par la patrouille et il savait bien ce qu'il allait faire. Tout était inscrit parfaitement dans sa tête ne permettant pas la moindre petite modification que quiconque désirerait apporter. Il savait ce qu'il devait faire et encore plus pourquoi ce désir s'était ancré dans son coeur et son âme, dans chaque partie de son corps, de son être, dans chaque petite fibre et cellule. Il savait et plus rien d'autre ne venait à exister, parce que tant qu'il savait, il pouvait poursuivre son but sans jamais arrêter, sans dévier, il pouvait pourchasser l'objectif, la fin du chemin de ce qu'il désire accomplir sans jamais faiblir puisqu'il était comme ça, puisqu'il ne faiblissait pas quand quelque chose venait à lui tenir autant à coeur. Cicatrice de Ronce faisait bien plus que lui tenir à coeur, elle etait essentielle à sa vie, à son existence, elle était son oxygène, son air, la raison pour laquelle il vivait, tenait debout. Il pourrait parler de cette féline pendant des heures, des journées, sans jamais arrêter, parce qu'elle prenait tout simplement toute la place dans son esprit et souvent, il ne pouvait penser qu'à elle, qu'à tout l'amour qu'il pourrait lui donner si seulement elle le laissait faire. Il ne pouvait souvent penser rien qu'au fait qu'il aimerait tant qu'elle laisse le fantôme de Nuage de Poussière prendre, justement, la poussière et laisser la chance aux vivants de le rendre heureuse. Il pourrait la rendre heureuse, il le savait, il en était tant persuadé. Mais elle ne le laisserait pas tant qu'elle continuait de côtoyer celui qui reposait sous terre et vivait dans les étoiles. Et elle ne semblait pas du tout vouloir oublier son compagnon et Cri de l'Agonie ne pouvait nier la jalousie le dévorant de l'intérieur. Il voulait la rendre heureuse, pas que ce soit quelqu'un d'autre qui le fasse. Il désirait tellement son amour, mais elle ne lui donnait pas, ne le ferait sûrement jamais.

Sa tête se redressa soudainement, vif, alerte, son regard parcourait maintenant les territoires en sachant que le moment allait arriver, que bientôt, il pourrait confronter celui qui était la cause de ce courroux violent, puissant, intense. Il attendait. Il ne pouvait faire que ça après tout, attendre que ce mâle se fasse voir dans la patrouille du soir et mettre ce plan ficelé à exécution. Il finit par entendre les bruits de pas de la patrouille et le premier pelage se fit voir, les autres suivant de ce fait, ce n'était rien de plus que de la logique maintenant. Cri de l'Agonie s'élança pour les rejoindre, il savait maintenant tout ce qu'il lui restait à faire. Il avait réussi à retrouver une apparence qui semblait plutôt calme, malgré son regard de feu, mais ça, le monde était habitué. La patrouille s'arrêta et il se fit demander ce qu'il y avait.

"Je crois que j'ai repéré des traces d'un renard. Je peux vous piquer un guerrier pour aller voir, Hantise Temporelle ? Viens, on va aller voir."

Il partit sans attendre la réponse du guerrier qu'il avait hélé. Cri de l'Agonie n'était pas le plus poli et dans sa fureur, il ne pensait certainement pas à se montrer ne serait-ce qu'un tout petit peu respectueux, non, ça lui sortait totalement de l'esprit, alors il n'attendait pas.

||Luny what is this truc ? T'en fais quoi ?||