Arrivée tardive [Libre]

La tension était à son comble. Je ne me sentais plus en sécurité. Je n'avais pas ressenti cela depuis des lunes et des lunes. La dernière assemblée avait été très tendue et Cicatrice de Ronces, une femelle du Clan de l'Ombre, ne m'avait pas rassuré sur la situation. Les Escogriffes, une bande de chats errants, semaient la terreur parmi les Clans et les Troupes. Ils avaient déjà kidnappés des membres de chacun des Clans, ce qui horrifiait tout les guerriers et tout les apprentis de tout les Clans.

Moi même je ne me sentais pas rassuré en cheminant au sein des Grands Pins, même si je savais que la patrouille frontalière n'était pas si loin. Je l'avais senti, elle devait renouveler le marquage près de la ville. Et puis les Escogriffes avaient eu ce qu'ils voulaient non ? La terreur des Clans. Cicatrice des Ronces voudrait que le Clan du Tonnerre se lie à celui de l'Ombre et des Troupes pour combattre les Escogriffes, afin de libérer nos camarades de la prison. Apeuré par la perceptive d'une grande bataille, moi qui n'avait même pas participé à une escarmouche ici, j'étais cependant loyal à mon Clan d'adoption, et fier de pouvoir le servir dans une bataille. Les guerriers ne prouvaient leur bravoure qu'au combat, et je le ferai pour la première fois.

En attendant, il fallait prendre des forces et même si les patrouilles de surveillance ne se réduisaient pas, il fallait bien que quelques matous se mettent à chasser. Aux aguets, j'humais l'air, à la recherche d'une odeur intéressante. Presque aussitôt, l'odeur d'une souris fraîche s'imposa à moi. Elle venait de derrière un buisson. Prudent, sur la pointe des pattes, je m'approchais avant de m'immobiliser, sceptique. L'humus de la forêt, une odeur habituelle, était ici beaucoup plus forte au fur et à mesure que j'avançais vers la souris. Et ce silence était louche.

Les muscles tendus, je fis un pas en arrière, mais tout d'un coup, je vis un félin sauter sur moi et me plaquer au sol. C'était un matou qui puait l'humus et la charogne. Les pattes posées contre mon poitrail, il m'empêchait de bouger. Je me débattais comme un beau diable en miaulant mais un autre chat me mordit la queue et un autre encore vint me poser la patte sur le museau. Je grondais, bandant mes muscles afin de lancer un coup de rein, mais l'odeur d'un dernier chat qui m'asséna un coup qui fit trembler mon échine. On aurait dit que sa patte était en pierre. Avant de pouvoir faire quoique ce soit, je perdis connaissance.

Lorsque mes yeux virent à nouveau la lumière, je crus que j'étais retourné au camp, que la patrouille avait chassé les inconnus et qu'ils m'avaient transporté jusqu'à une litière de mousse dans la tanière du guérisseur. Je tombais de haut en tournant la tête. J'étais dans une sorte de camp oui, mais pas le mien. Il ressemblait à une tanière de bipèdes. Je voyais du coin de l’œil d'autres chats, et je sentais une pile de gibier. Sonné, je fermais encore les yeux pour me reposer.

Un peu plus tard, je me réveillais en meilleur forme, mais avec une migraine qui me fit tituber lorsque je me levais. Je balayais le camp du regard, les oreilles en arrière. Je reconnaissais des chats, il y avait même des membres du Clan du Tonnerre. Aussitôt, l'affreuse vérité m'aplatit sur le sol. J'étais dans la Prison ! Les félins qui m'avaient assommé faisaient parti du groupe des Escogriffes, un paria. Je n'aurais pas cru qu'ils captureraient encore des chats, et pourtant je faisais parti de ceux là. D'abord affligé, je me souvins que nous allions être bientôt sauvés par nos Clans. Ils ne tarderont plus, enfin j'espère.

J'aperçus deux gardes au loin, à la porte de la Prison. Ils avaient l'air musclés, sous leur pelage miteux. J'imagine que si personne ne cherchait à sortir, c'est qu'il y avait bien plus de chats qui gardaient l'endroit. Je frémis. Et si ils étaient trop nombreux pour les Clans et les Troupes ? Et si nous restions à jamais ici ? Je ne pouvais le savoir. Les pattes tremblantes, je me rassis. J'étais épuisé. La lumière déclinait à l'intérieur de la Prison, signe que la nuit allait tomber. Il fallait que je mange, mais j'avais peur de m'approcher de la pile de proies entassées au centre de la bâtisse. Et si ces proies étaient réservées aux Escogriffes ? En voyant des reines dormant à cotés de leurs petits, je me ressaisis. Ces chats errants n'allaient pas nous laisser mourir de faim, ils nous voulaient juste comme otages.

La queue raide mais déterminé, je fis quelques pas vers le monticule et je pris une souris sale. La chaleur de mes semblables me manquait. J'essayais de sentir l'odeur de mon Clan, mais elle était noyée dans un fouillis d'odeurs. Résigné, je repartis à l'endroit où les Escogriffes m'avaient déposé et je commençais à manger ma proie.

Je mangeais tranquillement mon dîner, sans appétit. La souris avait une autre saveur ici, une mauvaise saveur. On aurait dit un rat. C'était sûrement une souris qui habitait près des bipèdes, sinon elle n'aurait pas si mauvais goût. De plus, l'humidité qui régnait ici donnait à l'air un relent poisseux, qui ne m'encourageait pas à manger. Pourtant il le fallait, je n'allais pas me laisser mourir, ça serait trop bête. Mes camarades sont loyaux, ils me sauveront.

L'estomac repu, je gardais un instant les restes de la souris devant mes pattes, les yeux dans le vague. Cette ambiance ne me faisait vraiment pas du bien. Au contraire du camp du Clan du Tonnerre, ouvert, chaud et lumineux, la Prison me faisait vraiment du mal psychologiquement. Je me mettais à imaginer des monstres à chaque ombre, et à sursauter à chaque bruit, même connu.

J'allais me lever pour pousser les restes de ma souris quelque part, ne pouvant pas creuser sur un sol dur de bipède, quand un félin me percuta violemment. Mille images défilèrent dans ma tête, et je revoyais ma capture au ralenti, un chat se précipitant sur moi, deux autres me tenant. Pourquoi les Escogriffes m'attaquaient-ils ? Voulaient-ils me tuer pour servir d'exemple aux Clans et aux Troupes ? Pour leur montrer le destin des otages ?

D'un bond, je m'éloignais de quelques longueurs de queue de souris, le dos hérissé, feulant de surprise. Puis je sortis mes griffes, qui crissèrent sur le sol, avant de me rendre compte que la chatte qui m'avait cogné semblait dépourvue de toute animosité. De plus, il me semblait que son odeur ne ressemblait pas à celle des chats errants.

Confus et un peu gêné, je me détendis et je rentrai mes griffes. La chatte brun tigré me fit face et je voyais dans ses yeux la même gêne que la mienne.

« Euh… bonjour. Désolée de vous être… hum... rentrée dedans. Je ne vous ai pas fait mal ? Je peux vous examiner, si vous le souhaitez. »

Je reniflais l'air avec attention, pour percevoir l'odeur de la chatte. C'était une chatte des Troupes, car son odeur n'était pas du tout clanique. Mais je ne pouvais distinguer si elle venait de la Troupe Inondée ou la Troupe Embrumée. Je n'avais senti l'odeur des troupes que rarement, et l'air de la Prison brouillait fortement les odeurs. Elle sentait les remèdes, peut être qu'elle était guérisseuse dans sa Troupe, et c'est pour cela qu'elle proposait gentiment de m'ausculter.

Je clignais des yeux, la vue un peu floue. Avec cette frayeur, ma migraine avait repris de plus belle et je me sentais mal sur mes pattes. Je pensais que j'allais m'évanouir, mais je tins bon.

Sans faire attention à la femelle pour l'instant, je titubais lentement vers ma couche de mousse, et je tombais sur le ventre dans un grognement. Le monde tournait autour de moi et je fermais les yeux pour m'éviter des nausées. Lorsque je rouvris les yeux, je demandais d'une voix faible :

« Je veux bien oui. Cette agitation a réveillé ma migraine, qui dure depuis que je suis arrivé ici. »

D'une patte maladroite, je touchais le haut de ma nuque, juste derrière mon crâne.

« J'ai mal ici. Je pense qu'un des Escogriffes m'a assommé avec un bâton ou autre chose. Vous pouvez faire quelque chose pour moi ? »

A travers la brume que je voyais, je crus percevoir du contentement dans le visage de la chatte, mais je n'étais pas sûr. A défaut de pouvoir le savoir, je reposais la tête sur mes pattes. (2/15) Je fermais les yeux, pour éviter le tournis et la nausée qui m'avaient pris dès que j'avais voulu regarder l'expression de la femelle. Il y eu un temps, sûrement de la réflexion avant que la femelle des Troupes m'approche. Je sentais son souffle se rapprocher, et se rapprocher de ma nuque. Je m'attendais à sentir sa patte m'effleurer l'échine, mais elle resta à distance, se contentant d'observer.

« Oulah… Ils ne vous ont pas raté. J’espère juste que je pourrai trouver de la grande camomille pour soigner votre mal de tête, sinon je ne pourrai pas faire grand-chose. »

De la grande camomille, je connaissais cette plante. Enfin, j'avais déjà entendu ce mot dans la bouche d'un guérisseur. C'était donc la guérisseuse de sa Troupe, enfin l'équivalent. Certains félins m'ont dit que les Troupes n'étaient pas du tout organisé comme nous, les Clans, et que chaque rôle avait un nom différent chez eux.

Je sentais la chatte s'éloigner, et je tentais d'ouvrir les yeux. Avec le repos, je voyais déjà mieux, et j'avais moins mal à la tête. La guérisseuse scrutait la Prison de long en large, guettant son remède. Mais il n'y avait rien. C'était un endroit de bipèdes, les bipèdes ne laissaient jamais de plantes utiles dans leur coin d'herbe, et encore moins dans leurs tanières. Ils laissaient seulement des plantes inutiles et gênantes, qui embaumaient l'air et faisaient éternuer.

Je levais la tête vers la femelle préoccupée :

« Il ne sert à rien de chercher. Il n'y a rien dans cet ancien nid de bipèdes. »

Je baissais la tête, avant de la relever à nouveau. Autant profiter de cette rencontre pour en apprendre le plus. Et puis, elle m'avait tout de même percuté, je pense qu'elle me doit quand même quelque chose ! Je n'allais pas me montrer indiscret, juste curieux. J'imagine qu'elle doit être un peu curieuse aussi. Je ne sais pas si les membres des Troupes connaissent tout les Clans de la forêt. Ils doivent sûrement connaître l'odeur du Clan de l'Ombre, car je sais que leurs terres se situent au delà des marécages poisseux du Clan de l'Ombre.

Je levais à nouveau ma tête vers elle, et d'une voix calme, dénuée de fatigue, je lui demandais :

« Quel est ton nom ? Je sais que tu viens d'une des deux Troupes, mais je n'avais jamais rencontré de membre des Troupes jusqu'à aujourd'hui. »

Je la fixais d'un regard curieux, attendant qu'elle me réponde. Devant le silence gênant qui s'installait entre nous, malgré les chuchotements alentours, je décidais d'engager la conversation. Puisque que je lui avais demandé son nom, autant commencer par donner le mien, elle se méfiera moins.

« Je m'appelle Torrent de Foudre, je suis un membre du Clan du Tonnerre. »

J'hésitais à continuer, pour préciser que je n'étais pas natif du Clan du Tonnerre, mais c'était un détail que les étrangers n'avaient pas à connaître. J'avais assez souffert de ce détail dans mon Clan d'accueil, inutile de revivre de mauvais souvenirs. Néanmoins j'étais inquiet à l'idée qu'elle ait entendu parler de moi, le chat errant qui avait intégré le Clan du Tonnerre.

La femelle prit son temps pour répondre, ce qui m’intrigua. Je n'avais rien demandé de secret. Se méfiait-elle de moi comme d'un rat ? Après ma présentation, ses réflexions furent encore plus longue, comme aussi, au lieu de détendre l'atmosphère, je l'avais envenimé. Je savais que la rivalité opposait tout les Clans, et que les Troupes étaient aussi des rivaux des Clans, mais quand même, elle pouvait faire un effort ! Nous étions tous prisonniers, alors Clan du Tonnerre, de la Rivière ou Troupe, peu importait. Il était vrai qu'avec toutes les batailles qu'il y avait eu, les inimités étaient fortes, mais les membre n'y sont pour rien. Nous sommes tous loyaux à nos Clans, quelque soit notre avis.

Finalement, la femelle finit par me répondre calmement :

« Je suis Nephtys bénie des Roseaux, botaniste de la Troupe Embrumée »

Puis le silence revint s’immiscer. Au début je fus perdu. Quel nom étrange ! Il ne ressemblait pas un nom de Clan, ou tout simplement aux noms que je connaissais depuis tout petit. Puis, elle avait dit qu'elle était botaniste. Cela devait être l'équivalent du guérisseur chez les Troupes, du moins dans la Troupe Embrumée.

Je hochais la tête, signifiant que j'étais ravi de faire sa connaissance. Mais je ne savais pas quoi ajouter. Elle n'avait pas l'air bavarde comme félin. Elle n'avait pas manifesté de curiosité à mon égard, ni quoique ce soit d'ailleurs. Elle m'avait répondu, point. Tentant une nouvelle fois de sympathiser avec la botaniste, j'engageais à nouveau la conversation :

« Alors, comment les Escogriffes t'ont capturé ? J'imagine qu'ils t'ont surpris pendant que tu cueillais des plantes, vu que tu es botaniste. »

Je remuais les oreilles, un peu gêné. Je ne voulais pas insinuer que les botanistes ne faisaient que cueillir des plantes. Les guérisseurs pouvaient chasser et se battre si ils n'avaient pas le choix. Peut être que les botanistes faisaient pareil.

La femelle me regarda dans les yeux, avec un regard qui m'effraya quelque peu. On aurait dit qu'elle cherchait à lire dans mes pensées. Aucun chat ne le pouvait, n'est-ce pas ? Les guérisseurs savaient beaucoup de chance à force d'observer leurs camarades, et grâce au Clan des Étoiles, mais ils ne pouvaient pas lire dans nos pensées. Ce regard me dérangeait, mais je le soutins, pour ne pas montrer ma peur.

Finalement, Nephtys me répondit avec une voix amicale :

« Oui, je cueillais des plantes quand ils m’ont capturée. Après tout, c’est mon rôle au sein de la Troupe : cueillir des plantes pour que les guérisseurs soignent les blessés, généralement. Et aussi, interpréter les signes de la Terre et l’Eau. »

Je dressais les oreilles. Elle cueillait des herbes pour les guérisseurs ? Donc il y avait plusieurs types de « guérisseur » dans les tribus ? Elle disait qu'elle interprétait également les signes de la Terre et l'Eau. S'agissait-il de leurs ancêtres ? Comme notre Clan des Étoiles ? Pourtant l'eau et la terre se trouvaient parmi nous. Nous foulons tous la terre et nous buvons l'eau. Comment ces deux choses pouvaient être aussi puissantes qu'il faille interpréter leurs signes ? Tout cela me déboussolait.

La botaniste se tut soudain, comme si elle en avait trop dit. Je remuais les moustaches. Parler de notre vie ne pouvait pas être une trahison. Nous le faisions bien à l'Assemblée. Qui est devenu guerrier, apprenti, qui a donné naissance à qui, qui est mort ou alors tout simplement comment ça allait, si la chasse était bonne. Donc je supposais que c'était la même chose pour un matou des Clans et une chatte des Troupes. J'étais en train d'effectuer la cérémonie du Partage.

Soudain, elle reprit la parole, peut être plus amusée que sérieuse :

« Et, euh… désolée si je parais si froide, c’est juste que… je n’aime pas trop parler, généralement, et… je crois que je ne suis pas très sociable. Mais je n’ai rien contre toi, je t’assure ! »

Je me léchais une patte et je la passais sur mon oreille en ronronnant. Elle me faisait penser à....à moi tiens ! C'était agréable de rencontrer des félins qui nous ressemblait, même si nous n'étions pas du même groupe de chat. Puis, avec un sourire, elle ajouta :

« Et j’avoue que je suis curieuse de savoir comment ça se passe, chez toi. Vous devez avoir un botaniste aussi, non ? Et…  Vous croyez en la Terre et l’Eau, si ce n’est pas indiscret ? »

Elle était tout de même curieuse, ce qui me rassurait. Pour moi, un félin qui n'est pas curieux n'est pas normal ! Même si je devais avouer que j'étais un peu peureux, cela ne m'empêchait pas de vouloir en savoir plus sur les choses qui m'avaient effrayé.

Je lui répondis du tac au tac, me rappelant comment on m'avait expliqué la vie clanique :

« Chez nous, le guérisseur nous soigne et ramasse les plantes. Sa connaissance des plantes fait qu'il doit aussi savoir les repérer en pleine nature en cas d'urgence. Il n'est assisté par personne, mis à part son apprenti, qui le remplacera à sa mort. Quand à la Terre et l'Eau... »

J'hésitais à parler des croyances. Je me souvenais à quel point il fut compliqué pour moi de comprendre que ailleurs, d'autres chats étaient guidés par d'autres croyances, d'autres ancêtres.  Mon tempérament et ma réflexion m'avaient poussé à comprendre et à croire au Clan des Étoiles, à leur faire confiance car ils veillent sur nous, même si ce ne sont pas mes propres ancêtres.

Je repris ma phrase, conscient que ma pause ne m'aidait pas à m'exprimer :

« Dans les Clans, nous ne croyons pas en la Terre et l'Eau. Nous croyons au Clan des Étoiles. »

Je levais la queue vers un trou de la Prison, qui laissait voir le ciel brillant de la nuit.

« Nos ancêtres veillent sur nous depuis la Toison Argentée. Même si nous vivons dans Quatre Clans distincts, nous rejoignons tous le Clan des Étoiles, qui n'a pas de frontières.Ce sont les guérisseurs qui interprètent les signes du Clan des Étoiles, dans le ciel, dans des visions ou des rêves envoyés par nos ancêtres. En définitive, le rôle joué par votre botaniste et votre guérisseur ne fait qu'un chez nous ! »

Je ronronnais à la fin de ma tirade. J'aimais bien expliquer des choses, que l'on m'avait transmise. Comme un mentor à son apprenti. Si c'est cela être mentor, alors j'avais hâte qu'on me confie un apprenti, même si j'étais encore considéré comme un étranger et non pas comme un guerrier à part entière. Mais considérons la situation présente. Même si le craquement du nid me faisait sursauter de temps à autre, j'avais hâte de connaître la réaction de la femelle. Sauf si, elle le prenait mal.

La chatte des Troupes était très ouverte d'esprit, et sans contester mes faits, elle me répondit aussitôt :

« Je comprends, maintenant. Vous placez donc votre sort entre les mains des étoiles. C’est une bien étrange croyance »

Même si le mot étrange me gênait un peu, je hochais la tête. Je répondais aussi solennellement

« Comme vous, vous placez votre sort entre les mains de la Terre et l'Eau. »

Nephtys réprima difficilement un bâillement, et je voyais ses yeux se fermer. Je pris conscience de ma propre fatigue, et surtout de l'heure qu'il était. La lune devait poindre haut dans le ciel, et la plupart des chats dormaient, tout autour de nous.

Les yeux bouffis de sommeil, la femelle me demanda :

« Je… je commence à être fatiguée. Je crois qu’il est temps de dormir, qu’en dis-tu ? »

Comme réponse, j'ouvrais la gueule et je baillais. Nephtys n'attendit pas ma réponse, et n'en attendait pas visiblement. Elle se roula en boule dans son nid de mousse, près de moi, et ferma les yeux. Les frontières n'existaient pas ici. Chacun se roulait en boule près d'un autre félin, sans soucier de leur appartenance à l'un des groupes qui se partageaient la forêt. Nous étions tous prisonniers des Escogriffes, et nous avions tous la même volonté, sortir d'ici.

En posant mon museau sur mes pattes, je me rendis compte que se construire un groupe était simple. Il suffisait simplement d'avoir un intérêt commun. Actuellement, c'était se sortir de la Prison. Tout cela avait suffit à effacer les divisions claniques et tribales. Comme quoi, nous n'étions pas si différent, malgré nos lieux de naissance.

[Je suis d'accord pour clôturer :) Merci d'avoir RP avec moi!]

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