Uncle, I'm lost. I don't know what to do. Can you help me ? ♦ Feat Fiaìn

Don't worry, nephew

L’échec de mon Épreuve m’avait porté un grand coup. Un coup sur mon ego, un coup sur ma fierté. Un coup autant moral que physique. J’avais été affaibli par ma chute dans l’eau gelée du lac, et même en puisant dans toutes mes forces, il m’était difficile de me battre ou d’aller chasser. Mes muscles me faisaient souffrir et les courbatures qui y avaient élu domicile me faisait par moment me plier en deux sous la douleur. Convalescent, je regrettais amèrement mes actes, et ne cessais de me réprimander, de me maudire pour les conneries que j’avais faites. Je retardais plus que jamais mon “passage à l’âge adulte” ainsi, et je ne pouvais m’en prendre qu’à moi-même. Je rouspétais, furieux contre mon imbécile besoin d’être toujours au devant de la scène. Furieux contre ma recherche constante d’admiration. Mon museau souffrait depuis ma petite baignade, et chaque inspiration me donnait des maux de tête, faisant couler par la même occasion quelques désagréables gouttes salées. Il aurait été difficile de me haïr autant que je le faisais à ce moment-là. Transi de froid, mon corps ne cessait de frissonner, d’être parcouru de spasmes irréguliers. Ah, ce que je pouvais m’en vouloir. Je ne le montrai pas, mais se déchaînaient en moi des forces contraires ; l’une d’elle tentait de m’obliger à oublier cet épisode troublant, tandis que l’autre voulait absolument que je le garde en tête, afin ne pas oublier mes erreurs. Et comme si ça n’avait pas suffit, la maladie me faisait tourner la tête.

Après avoir donc dormi autant que je le pouvais malgré les réveils plus que fréquents que je subissais de la part de ce coup de froid qui m’obstruait la gorge, je m’étirai, doucement, serrant les mâchoires sous la douleur de mes muscles courbaturés. Je quittais ma couche et par la même occasion la tanière, sortant au-dehors. Le ciel pleurait, blessé, sombre. Quelques flaques s’étaient formées çà et là, inondant le camp. La pluie, il ne manquait plus que ça. Je soupirai. Ne sortirons nous donc jamais de cette terrible saison ? Cette saison froide, humide et qui ne semblait jamais prendre fin. Je ne devais pas être le seul à souffrir mentalement de ce temps morose qui durait bien trop longtemps. Et moi, qui, de plus, ne pouvait même pas sortir me dépenser, penser à autre chose, à cause de la douleur. Quelle merde. Tout me ramenait à penser à cette terrible défaite. L'Eau et le Terre ne m’avaient-elles donc pas accordé leur confiance ? Je me repassais le film en boucle dans ma tête, ne cessant jamais de sentir le glace se fendre sous mes pattes, et la désagréable sensation du vide s’ouvrir sous mon poids. J’avais pourtant cru y avoir pensé. Quel con, bon sang ! Je me mordais la joue de l'intérieur, furieux contre moi-même. Et je continuais à broyer du noir, tournant en rond comme dans un cauchemar vivant, sans que je puisse y apporter une réponse et enfin en sortir. La météo devait très probablement jouer un rôle dans tout ça.

Le camp était quasiment désert, je fus donc surpris d’entendre un chat qui avait apparemment décidé se balader sous la pluie. Je détournais le regard pour apercevoir un chaton. Il fallait s’en douter, après tout, il n’y avait que les plus jeunes pour être assez fous et sortir dehors avec un tel temps. Je le reconnaissais rapidement. Wani, mon neveu. Sa bouille innocente m’avait apparemment sondée et il s’approchait tout joyeusement de moi. J'espérais juste, pour lui et pour moi, qu'il ne s’amuserait pas à plonger tête première dans l’une des flaques. J’avais mal juste à l’idée de me voir devoir refaire ma toilette, et de devoir m’étirer. Aïe. Par chance, il esquiva toutes les traîtres de flaques et parvint jusqu’à moi sans trop de problème. Je connaissais chaque membre de la Tribu. Les Novices et les Chasseurs faisait de même. Une vraie famille. La voix chantonnante du chaton me ramena sur terre : “Bonjour, Fiaìn. Comment vas-tu ?” demanda-t-il poliment. Oh, je n’étais pas si loin de l’âge d’un Petit, finalement, et il m’était facile de savoir que Wani avait une idée en tête ; il ne venait pas me voir pour me demander simplement des nouvelles. Je le regardai et souriai, oubliant rapidement tous les maux qui me faisaient souffrir depuis plusieurs jours et qui m’avaient - encore - fait passé une terrible nuit. Wani avait un don, du moins tous les chatons avaient un don, celui de m’attendrir.

Pourquoi ne pas discuter un peu avec mon neveu ? Qu’avais-je d’autre à faire, au fond ? Moi qui ne cessais de répéter en boucle que j’étais coincé au camp, j’avais enfin de quoi passer le temps. C’était l’occasion rêvée de tisser des liens solides avec ma famille. Wani avait beau être mon neveu, je le connaissais autant que certains de mes frères et sœurs. Il était aussi proche et occupait la même place qu’eux, même en temps que neveu. Et cette connotation de “neveu” me plaisait bien. Comme si je cherchais à avoir une génération de plus sur le chaton, comme pour le prendre sous mon aile. “Malgré un temps plus que désolant et ma maladie qui n’en finit plus, je me porte plutôt bien. Et toi ? Tu n’es pas avec Renian et Vind ?” je lui demandais, essayant de lancer un sujet de discussion, malgré le fait que je fusse totalement à court d’idée de conversation. Difficile d’entretenir un dialogue avec un chaton, en même temps.