Souris donc, je t'ai laissé ta mâchoire [Feat Willow]

Plic.

Une forme étrange, immense, tordue, observait silencieusement le fond du tunnel. Il y faisait si sombre que même ses yeux brillants ne pouvait pas percer cette sorte de voile obscure. L'obscurité y était opaque, gluante, suintante, on pouvait presque entendre l'echo de cris de douleur lointains.

Plic.

Le monstre baissa ses pupilles fendues vers ses pattes couvertes d'eau croupie, de tourbe et de sang. Il en leva une et l'inspecta de plus près. Il cru apercevoir un bout de chair caché dans tous les poils qui s'y étaient collé. Il était gâté, brunâtre et dégageait une odeur immonde. Ça n'empêcha pas le charognard de se lécher les griffes jusqu'à l'avoir décroché et englouti.

Plic.

Agacé, le croque-mitaine leva la tête vers le cadavre disloqué empalé à un barreau tordu, le ventre ouvert, les entrailles pendantes comme des lianes putrides. Il s'agissait d'un chat autrefois tout blanc, gentil et affectueux. Aujourd'hui, ce n'était plus qu'un pantin cassé avec une barre en métal jaillissant de la poitrine comme un crochet de boucher, aux yeux globuleux et à la gueule ouverte, laissant s'écouler du sang goutte à goutte.

L'abatteur s'approchait du cadavre pour le décrocher quand un bruit fit pivoter une de ses oreilles. Il aperçut un rat, un de ses petits sujets, comme il aimait à les appeler, fuir quelque chose dans le tunnel infect derrière lui, ses petites pattes cliquetant sur le sol. Il passa à bonne distance du cannibale avant de disparaître dans l'ombre impénétrable.
Le croque-mitaine tourna légèrement la tête et afficha un grand sourire.

"Je commençais à croire que tu ne viendrais pas. Tu t'étais perdue, je me trompe ?"

Vieux Borgne se retourna en rigolant doucement, observant la silhouette indéfinissable dans l'obscurité. À l'odeur, il pouvait déjà juger -malgré la puanteur ambiante- qu'il s'agissait d'une de ses comparses favorites.