Chasse à l'escargot qui tourne en chasse au criminel [Equi/Mashy]

Aujourd’hui, il pleut. Il pleut, mais ça ne me dérange pas. J’adore la pluie. Et puis franchement, vous croyez que parce qu’il pleut, j’allais rester à l’abri, sans rien faire ? Ça serait un gâchis de temps épouvantable ! Non, moi, quand il pleut, je joue à sauter par-dessus les flaques, à en remuer l’eau pour voir mon reflet changer, et, surtout, à rechercher ces petites bêtes molles, avec une coquille, qui sortent quand il pleut.

Je connais beaucoup de chats qui sont déprimés par l’arrivée de la pluie. Je me demande bien pourquoi. La pluie, c’est si joli ! Ce n’est pas triste, même si ce sont les nuages qui pleurent (du moins, c’est ce que m’a dit ma sœur), ce sont des larmes de joie. Et puis, la pluie est synonyme de renouveau ! Quand il pleut, c’est la fin de la sécheresse. Ou la fin des neiges. C’est agréable, et même si ça crée parfois des inondations, c’est pas si grave que ça ! Les chats aussi, ça peut tuer, mais ça peut aussi protéger. Et puis, il y en a qui sont gentils. Comme moi !

Attendez. Là, c’est quoi… un escargot ! Oui, ça s’appelle comme ça, les petites bêtes à coquille. Des escargots. C’est tout mou, ça a pas l’air appétissant comme ça, mais il paraît que lors des famines, quand on a rien d’autre à manger, on peut se rabattre sur ça. Mais on est pas en période de disette, là ! Bon, ça commence à pas être super, mais il y a eu pire. Je suppose. J’ai jamais connu de saison des neiges, moi, et ma sœur non plus d’ailleurs. Ça a pas l’air très marrant.

Je pourrais jouer à être en période de famine, mais j’ai pas envie de manger d’escargots, moi. Je préfère les regarder. Ils sont super intéressants. Ils ont une vie passionnante. Pourtant, ils sont très lents, mais c’est pas pour autant qu’ils perdent leur temps. Ils ne s’arrêtent jamais, parce qu’ils savent que s’ils s’arrêtent, ils perdront du temps. Ils sont toujours en avance. Ils prévoient toujours le temps nécessaire, et au final, ils sont à l’heure. En échange, ils sont constamment en mouvement. Mais qui ça peut déranger ? Quand on bouge pas, on s’ennuie, de toute façon.

J’en suis un. Et oui, je suis un escargot. C’est un peu long, mais c’est pas grave. Quoi ? Vous croyiez que j’étais un escargot ? Non, pas du tout ! Je suis rapide, moi. Je suis toujours en mouvement aussi, mais c’est parce que j’ai beaucoup de choses à faire ! Comme un escargot, mais pas à la même échelle.
Bref, je suis un escargot qui va vers un buisson. Du coup je cours très vite, et après, je repars en arrière pour vérifier où il en est. Je l’escorte, en fait. Il doit se demander ce qu’il se passe. Mais au moins, je le protège. Tu es en sécurité avec moi, petit escargot.

A un moment, je m’arrête devant le buisson. Je me fige, terrifiée. L’escargot me rattrape. C’est là qu’il comprend (peut-être) ce qui se passe. Il se cache dans les buissons. Je ne sais pas s’il en ressort. Je ne le suivrai pas ici. Pas avec ce que j’ai vu derrière ces buissons.
Il y a un corps. Oui, un corps. Quelqu’un qui dort. Mais ses yeux figés et la blessure qui lacère son cou me laissent penser qu’il ne se réveillera pas. Je suis tétanisée. Impossible pour moi d’esquisser un seul geste. La peur me paralyse. Je ne peux plus penser. La vue de ce cadavre m’effraie beaucoup trop. Je reste là, plantée, sans rien faire.

Sans rien faire jusqu’à ce qu’arrive une chatte, petite, plus jeune que Maan mais plus vieille que moi. Elle écarte les buissons derrière moi en criant quelque chose que je n’entends pas, dans ma stupéfaction. Elle passe de l’autre côté et commence à examiner le cadavre. La vue de cette chatte me rassure un peu. Disons que voir quelqu’un d’autre s’approche de ce corps me pousse à le faire, moi-aussi. Je passe la barrière des buissons. Aucune trace de mon escargot, mais j’avoue que ce n’est plus ma principale préoccupation. Je m’approche et regarde la femelle en miaulant, le choc encore présent dans ma voix :

« Bonjour. Vous faites quoi ? »