Without the mask, where will you hide ; Can't find yourself lost in your lie.[Azurite Fragmentée]

Ça faisait quelque jours déjà que la féline noire et blanche allait mieux, ses blessures s’étaient soignées. Une chance, il fallait dire, qu’il y avait une ancienne guérisseuse dans leur groupe de solitaires. Bien qu’elle n’aimait pas dépendre des autres. Abrasement d’Obsidienne n’aurait jamais pu s’occuper de ses plaies elle-même. Ça ne voulait pas dire qu’elle ressentait quelconque attachement avec ceux qui partageaient son nid. Instinct de survie. Elle y restait parce qu’il était bien plus assuré qu’elle ne se fasse pas attacher au beau milieu de la nuit par des prédateurs ou d’autres chats, et qu’ils aient le dessus sur elle. La plupart des chats qui restaient groupés ainsi étaient poussés par le même désir de vengeance, et cette haine qui brûlait à l’intérieur, ils la connaissaient tous. Mais aucun ne l’expérimentait autant qu’elle. Au final, elle ne pouvait faire confiance qu’à elle-même, et personne d’autre. Si le Clan des Étoiles avait bel et bien décidé de la maudire, elle n’avait aucun autre choix que d’avancer, et lui prouver que la force ne se mesurait pas qu’à la masse corporelle.

Et obstinée qu’elle était, elle s’était encore retrouvée sur le territoire du Clan de l’Ombre. Malgré sa rencontre avec Azurite Fragmentée. Elle avait eu  de la chance, cette fois-ci, d’être tombée sur une chatte qui n’était pas du tout agressive. Rien n’était certain qu’elle ne rencontrerait pas un guerrier qui souhaitait la défaire en morceaux. Mais elle était comme ça, Obsi. Elle jouait avec le feu, testait les limites. Ça avait le don d’en énerver plus d’un, lorsqu’elle était apprentie. Elle avait cette expression arrogante, qui se faisait pardonner parce qu’elle était jeune et innocente. Plus maintenant. Maintenant, les erreurs n’étaient plus permises, et ils l’avaient bien fait sentir.

Des mouvements craquèrent des branches mortes, alertant immédiatement la féline bicolore. Mais elle était en bonne position pour se défendre, contrairement à la dernière fois. On aurait facilement pu croire que le destin était en faveur d’Abrasement d’Obsidienne, lorsque se fut Azurite Fragmentée - une seconde fois - qui pointa le bout de son museau. La solitaire lâcha la position défensive, n’ayant aucune envie de se battre contre la seule féline ayant été gentille avec elle. Mais, il fallait bien qu’elle trouve quelque chose à dire, une raison pourquoi elle s’était retrouvée, encore, à traîner sur un territoire qui n’était pas le sien. Parce qu’elle était faite ainsi, et parce qu’il fallait bien qu’elle se protège. elle opta pour le mensonge. Bien que la guerrière lui avait semblé sympathique, la vie lui avait appris que c’était lorsqu’elle avait le dos tourné que les plus fourbes essayaient de lui sauter dessus.

“Hey, bonjour Azurite. Il y avait un blaireau qui a passé par ici, alors je voulais m’assurer qu’il ne se dirige par vers le camp. J’espère que ça ne dérange pas. Je l’ai perdu de vue, par contre…”

Oh, petite Obsidienne. Apprendras-tu à dire la vérité ?

Il n'y avait aucun doute, la femelle avait été, encore une fois, très chanceuse. Mais, cette fois-ci, c'était différent. Abrasement d'Obsidienne n'avait pas été dans le mensonge le plus crédible, et la noiraude avait découvert sa supercherie ; en était déçue. Il fallait être aveugle pour ne pas le remarquer - sans mauvais jeu de mots -. Après, la bicolore n'avait jamais été bien bonne avec les relations. Elle ne savait pas comment garder des amis, un compagnon. Elle-même ne comprenait pas comment elle avait fait, lorsqu'elle était encore membre du Clan du Vent. À part les accrochages avec son frère, sa sœur, ses relations amicales ne s'étaient pas tout à fait noyé. Pas encore. Maintenant, elle ne savait plus comment interagir. Et elle avait blessé la féline.

"Pardon."

Elle s'était excusée. D'un miaulement, sec et rauque, certes, mais des excuses restaient des excuses. Il ne fallait pas le négliger. Elle aurait pu souffler des bêtises et partir, ne plus jamais y penser. Cependant, il y avait quelque chose de différent, par rapport à la guerrière, un petit quelque chose qui lui donnait envie de jouer franc jeu avec elle. Sans aucun doute, Obsi changeait, en sa présence, malgré le fait qu'elle ne le remarquait pas. Elle avait baissé la tête légèrement, plaqué ses oreilles contre sa tête, un peu comme lorsqu'un chaton se faisait réprimander.

"Tu as raison. Je n'ai aucun droit d'être ici."

Pour une fois, l'Obsidienne semblait crédible, alors qu'elle s'adressait à la chatte en face d'elle. Elle avait été prise la patte dans le sac, il faudrait bien qu'elle apprenne de ses erreurs un jour.
Elle n'avait pas peur d'elle. Pour Azurite Fragmentée, ça ne signifiait sûrement pas grand chose. Elle était une fière guerrière de son Clan, avait un grand cœur, et ne portait pas - ou rarement - de préjugés. Pour Abrasement d'Obsidienne, c'était tout autre chose. Ça signifiait bien plus qu'elle était prête à l'admettre. Elle s'assit, se détendit, en observant l'autre. Elle n'avait toujours pas détallé, ne l'avait pas abandonné, pas encore. Peut-être devrait-elle saisir sa chance, cette fois-ci ? Il y avait un temps où elle bavardait jusqu'à pas d'heure, elle pouvait bien faire un effort. Mais, tout d'abord, Obsi avait quelques questionnements à son propos.

"Pourquoi n'as-tu pas peur de moi ? La majorité détalle en me voyant, mais toi, tu es restée.”

Question légitime. La solitaire était tant habituée aux regards apeurés que c’était des comportements comme ceux-ci qui lui paraissent anormaux. Parfois, elle était celle qui causait délibérément cette peur.

Elle aimait bien le territoire du Clan de l'Ombre, bien qu'elle détestait la boue qui s'y trouvait presque partout. Elle ne comprenait pas comment ses membres pouvaient y vivre toute leur vie, quoique ça devrait être tolérable pour les chats nés de l'endroit. Azurite Fragmentée semblait être confortable, et elle ne ressemblait certainement pas aux méchants gros félins peuplant les histoires de sa vie de sa vie de chatonne, celles qu'on racontait aux petits pour espérer leur faire peur et éviter qu'ils traversent les frontières. Non, elle, elle était calme, gentille, douce. Tout le contraire d'une bête sanguinaire.

De son œil valide, elle fixait la femelle. Essayait de comprendre pourquoi elle l'intriguait tant que ça, l'analysait. Elle avait quelque chose de différent, oui. Depuis sa première rencontre avec Azurite Fragmentée, elle n'avait pas arrêté de revoir le scénario, en boucle et du matin au soir. La femelle ne venait peut-être pas du Clan de l'Ombre ? Ça aurait été une raison suffisante pour ne pas s'énerver au sujet des frontières. C'était tout de même la première à avoir démontré de l'empathie, à avoir été amicale avec elle, alors la noiraude sortait forcément du lot. Ou alors, elle se moquait carrément d'elle, attendait juste qu'elle tourne le dos pour lui sauter dessus. Non. La solitaire ne voulait pas la croire capable d'un tel acte. Son père lui avait toujours dit de se méfier, et ça lui avait causé à éloigner de sa vie tous ceux qui avaient eu une influence positive sur elle. Maintenant qu'elle n'était plus sur son emprise, elle pouvait peut-être repartir à zero.

Les mots qu'Azurite utilisait se mélangeaient dans sa tête, comme si elle les prononçait d'une langue étrangère. L'Obsidienne ne savait pas trop si tout ce que l'Azurite disait était vrai. Cependant, elle n'avait pas peur d'elle et ça, ça comptait pour beaucoup, bien qu'elle n'irait pas l'avouer. La guerrière ne la jugeait pas, mais il ne fallait pas espérer trop vite, au risque d'être déçue plus tard, Azurite Fragmentée ne connaissant rien d'elle. Son passé, sa famille, ses erreurs, ses motivations et désirs. Rien n'assurait qu'elle n'allait pas changer d'idée à son sujet, alors la bicolore préférait ne pas trop espérer. L'espoir faisait vivre, mais l'espoir faisait également bien mal. Elle avait beau être une chatte avec un cœur qui battait comme les autres, elle n'était pas comme les autres.

"Dis-moi…"

Abrasement d'Obsidienne la regardait en penchant la tête, comme si elle cherchait quoi dire à ce moment précis.

"Viens-tu réellement du Clan de l'Ombre ?"